Le Private Equity français en crise ?
Les Echos disent que le PE est en voie de disparition. Ils ont tort. Des LPs rationnels mais volontaristes en tireront tous les bénéfices !
FRANÇAIS
1/25/20256 min read


Un article du 24 janvier des Echos ( ici ) a secoué le microcosme du Private Equity à Paris. Le secteur est en crise. Tous les fonds nommés seraient en crise. Voire en voie de disparition.
Et il y a des gens qui nous appellent pour savoir si cela vaut toujours la peine d'investir en Private Equity en France.
La première chose que nous devons faire, c'est d'attirer l'attention des lecteurs sur le ton légèrement triomphant de la journaliste des Echos. Puis, elle cite des faits qui s'étirent sur une période d'environ 2 ans. Il est vrai que cela s'accélère. Comme tout en France... Mais plutôt que d'analyser ce mouvement en relation avec le délitement absolu de l'économie française, provoqué par les apprentis sorciers politiques qui n'ont jamais travaillé ou créé de la valeur comme les gens qui sont moqués ou décriés dans l'article des Echos, on pointe toutes les faiblesses du Private Equity. En oubliant les faits, réels, qui sont régulièrement soulignés par France Invest, et qui montrent que les fonds de PE ne sont point nuisibles, mais soutiennent l'économie française dans tous les challenges qu'elle subit par la négligence coupable des gouvernements successifs.
Regardons de plus près ce que le mouvement, décrit dans l'article ci-joint, provoquera pour les investisseurs dans les fonds de Private Equity exposés à la France. Et analysons froidement s'il s'agit d'une si mauvaise nouvelle. Spoiler : nous ne le pensons pas. La France, au vu des difficultés dans lesquelles elle a été plongée par une caste politique défaillante, ne fait que jouer le rôle de précurseur... Ce mouvement va se produire partout. Et il sera salutaire pour le métier, et surtout pour les investisseurs qui auront les nerfs pour y rester exposés.
Regardons les faits relatés dans l'article :
- Une banque d'investissement se focalisant sur le conseil aux fonds de PE, DC Advisory, ferme son bureau parisien. Les équipes, même dans les trois dernières années que l'on peut sans doute qualifier de très difficiles (comme 2007 à 2009), ont réalisé des transactions et généré des commissions importantes. Pourtant, leur maison-mère au Japon décide de fermer le bureau... Est-ce que ce ne serait pas lié au fait que ces japonais, comme la plupart des investisseurs étrangers, perdent foi dans la France ? Qu'ils ne comprennent plus rien au foutoir qu'est devenu le gouvernement et le parlement ? Qu'ils se disent que leurs clients, fonds d'investissement ou vendeurs de sociétés auxdits fonds sont tellement décriés en France tous les jours par des politiques incompétents mais sûrs de leur opinion qui n'est pas basée sur des faits mais de l'idéologie stérile ? Le consensus du marché prévoyait un redémarrage des transactions en septembre 2024. Puis vint la dissolution, puis vint le foutoir, puis vint le concours l'Epine de la nouvelle taxe. Puis vint la remise en cause de la réforme des retraites, déjà une réformette qui ne résout rien, sacrifiée sur l'autel du maintien de l'actuel Premier Ministre jusqu'au 31 mars 2025... Les asiatiques, étant loin du microcosme parisien, regardent les faits et la synthèse. Ils ne comprennent pas (comme le contribuable français d'ailleurs). Mais ils ont moins de scrupules de tirer un trait. En bref, 40 banquiers compétents et vaillants se retrouvent sur le marché. Un marché compliqué. Car ce n'est pas en 2025 que les affaires reprendront en France, au vu de la situation politique ubuesque qui soulève tellement de craintes que plus aucun acteur économique n'ose prendre des décisions à moyen terme.
- Certains fonds réduisent la voilure ou ferment leur bureau parisien. Même cause, mêmes conséquences. Pas de transactions, pas besoin de garder une présence physique. S'y rajoute l'incertitude supplémentaire du fait médiatique arbitraire (et franchement pathétique) concernant le "secteur stratégique", tel que vécu sur le Doliprane... Quel fonds qui vise à racheter et à développer une société pour faire une plus-value dans 3 à 5 ans va encore regarder des sociétés françaises, si les gouvernants médiocres visent à bloquer la cession d'un façonneur qui presse des pilules à partir d'un princeps sourcé en Inde ?
- De plus, et ce ne sera jamais cité dans la presse française, les équipes desdits fonds ne se retrouvent pas sur le carreau ! Elles sont très heureuses de migrer aux Pays-Bas, en Angleterre ou au Luxembourg. Moins de contraintes, moins d'impôts, et surtout moins d'arbitraire et de mauvaise presse !
En résumé, la France continue à brailler, mais elle est muette. Plus personne ne l'écoute. Un regard froid montre tous les problèmes structurels importants qu'aucun responsable politique n'ose attaquer. La Finance, peuplée de gens vaguement intelligents et surtout mobiles, l'a compris et en tire les conséquences...
Toutefois, il est vrai que le secteur du Private Equity traverse une crise. Comme en 2000/2001, 2007/2008, ou (pour l'Europe) en 2011/12. Aujourd'hui, les raisons, réduites dans l'article de manière un peu simpliste mais réaliste à la hausse structurelle des taux d'intérêts, provoquent des changements de paradigme pour les fonds. Ils lèvent moins. Il ne peuvent plus vivre des commissions de gestion générées par des fonds de plus en plus grands. Oui, il va y avoir de la casse. Des fonds performants vont devoir réduire la voilure. Des fonds moins performants ne lèveront plus et disparaîtront...
Est-ce une mauvaise nouvelle pour les investisseurs ? Non ! Ni d'ailleurs nécessairement pour les équipes de gestion. On va revenir aux fondamentaux qui ont fait du Private Equity une classe d'actifs à part entière et qui a été (et restera à notre avis) plus performante que les actifs publics (cf nos précédents posts). Comment ?
- Les équipes des fonds ne gagneront plus leur vie sur les fees uniquement. Ils devront se rappeler que la principale source d'enrichissement est le carried interest (le partage de la plus-value). Il est vrai que depuis 10 ans, les fonds levaient de tels montant que la performance ne comptait plus, les fees rendaient les associés riches. Si les nouvelles levées se font à volume réduit, les équipes vont réaliser que le carried interest vaut de l'argent. Or, de la plus-value, les bons fonds en génèrent par toutes les météos.
- Le marché français a été parmi les plus actifs en Europe sur les 10 dernières années. Les fonds sont des acteurs à part entière dans le paysage. Ils ont des portefeuilles à vendre. Et ils constituent une source de liquidité incontournable (puisque les mêmes politiques ne veulent toujours pas entendre parler de fonds de pension, continuent à contraindre le capital long par des règlementations comme Bâle ou Solvency, que d'autres blocs refusent). Les fonds resteront un acteur incontournable. Mais comme dans chaque tempête, on ferme les écoutilles et on sort les voiles au premier rayon de soleil. Ce rayon adviendra-t-il en 2025 ou en 2026 ? On ne saurait vous dire. Mais ces professionnels sauront l'anticiper. Et ils en profiteront pour faire tourner leurs portefeuilles, qui sont figés aujourd'hui. Et avec leurs fonds à disposition, ils sauront saisir les opportunités. Ils le feront de l'étranger, plus nécessairement de Paris, mais ils ne se détourneront pas de la France. N'oublions pas que la France génère les meilleurs entrepreneurs du Monde ! Et pour cause ! S'ils sont en France et réussissent, malgré un environnement contraint et hostile tel que vécu sur les 40 dernières années, c'est qu'ils sont meilleurs que tous les autres. Seulement nos politiques ne le comprennent pas.
En résumé, le mouvement de repli de ces derniers mois de la part de fonds établis à Paris ne veut pas dire que ces fonds se désintéressent d'un des principaux marchés européens. L'instabilité actuelle provoque des opportunités d'investissement et de création de valeur comme dans tous les pays ou périodes sous stress. Un LP averti aura tout intérêt à choisir ce pays comme cible de déploiement prioritaire, à condition d'investir dans des équipes professionnelles et éprouvées.
Malgré tous les efforts d'une caste politique médiocre, incompétente et stérile, le marché de l'investissement en France n'est pas mort ! Il recèle plutôt d'un potentiel important à saisir pour les LPs qui ont du flair et des nerfs. Et qui en seront récompensés.
Make France desirable again ! And shut out the noise. Fundamentals are there to be seized !